Le 210ème Jour a été écrit en 1906, juste après Oreiller d'herbes dont il constitue, en quelque sorte, le pendant ironique. Divertissement poétique, ce bref roman dialogué peut-être considéré comme une rêverie légère sur la civilisation moderne. Le 210ème Jour (à partir du début du printemps) tombe en pleine saison des typhons. C'est le moment où deux amis décident d'entreprendre ensemble l'ascension d'un volcan en activité. Malgré la pluie, le vent, les herbes foisonnantes, la fumée, la cendre et le terrifiant cratère qui gronde, atteindront-ils le sommet de la montagne ? Ces Bouvard et Pécuchet de l'alpinisme dissertent plus qu'ils n'agissent. Les sujets qu'ils abordent, sous des prétextes apparemment futiles, ne manquent pas de gravité. Le bruit du marteau d'un maréchal-ferrant, la cloche d'un temple, la conversation de voisins d'auberge : et les voilà qui palabrent et refont le monde. L'art de Sôseki consiste à tracer en filigrane d'une conversation à bâtons rompus, pleine d'humour et de rebondissements imprévus, les limites fragiles de la dérision et de l'angoisse. Autant dans Oreiller d'herbes. Söseki s'était attaché à créer une situation explicitement poétique, autant ici, il s'emploie à ne révéler l'émotion poétique que par contraste, reflets indirects, et à travers deux héros cocasses et candides. Une fois encore, Sôseki affirme son extraordinaire liberté formelle, dans un texte qui annonce le théâtre de l'absurde, mais qu'il situe dans une nature profondément japonaise. |