La poésie est l'essence du langage divin. Suivant la volonté divine, les hommes ont érigé la poésie en art qui devait être accessible à tous. La poésie est donc le fondement de la culture japonaise.
Depuis les temps premiers, des poètes se sont distingués et, parmi eux, de talentueuses poétesses. La plus fascinante, mais aussi la plus mystérieuse, fut Ono no Komachi, qui vécut au IXe siècle. Seule femme élue parmi les Six Poètes Immortels, elle acquit une célébrité hors du commun. De son œuvre poétique, seuls vingt et un poèmes avérés ont été conservés - vingt-deux, selon certains.
A-t-elle existé ou n'a-t-elle été qu'un personnage légendaire ? Le doute plane jusque dans ses poèmes, où couve une mélancolie à la fois profonde et lucide. La passion amoureuse s'y exprime insaisissable, impossible à se réaliser, en des formules imprégnées de fragilité ou de délicatesse. Le style est d'une rare élégance, révélant l'habileté extrême de la poétesse à jouer sur les métaphores, les sous-entendus, les jeux de mots cryptés.
Les poèmes de Komachi, autant que la puissance du mythe qui l'enveloppe, n'ont cessé d'intriguer et d'inspirer poètes et dramaturges, au Japon comme en Occident, dont Yukio Mishima, Henri Michaux, Jacques Roubaud ou Michel Butor pour notre XXe siècle. |